L’addiction est toujours présentée comme un vice, mais si on réfléchit bien, n’est-elle pas en fait une vertu cachée, une faculté de rêverie divine et mystérieuse qui nous permet de fuir le réel, de jeter au fond du puits les tabous et de nager en toute quiétude en eaux troubles ? Et si les sept péchés capitaux étaient en fin de compte les sept plaisirs capitaux ? Alors comme Nicole Kidman sur le tournage de Eyes Wide Shut, adoptez une posture Akro !
par Anne Bougeois
Olivier Cresp et Angel
Akro est une marque de parfum de niche cofondée par Anaïs Cresp et Olivier Cresp. Ce dernier, maître parfumeur chez Firmenich a composé l’emblématique Angel il y a 31 ans, une véritable bombe qui a révolutionné la parfumerie moderne. L’histoire d’Angel est celle pensée par le créateur de mode transgressif Thierry Mugler qui souhaitait concevoir une fragrance inédite, régressive, qui lui rappellerait du plus loin de son enfance, les effluves de barbe à papa des fêtes foraines pleines de rires. Plus de 600 essais ont été nécessaires pour satisfaire l’imaginaire olfactif du grand couturier. Entre douceur de l’enfance et féminité exacerbée, son odeur capiteuse et envoûtante mélange de patchouli, de notes de fruits, de caramel, de miel et de chocolat connaît un succès immédiat et mondial. Lors de sa sortie en 1992, ce parfum a provoqué une telle déflagration que les références olfactives existantes sur le marché de l’époque en sont devenues désuètes. Angel est devenu le symbole de l’addiction olfactive et ouvert la voie à la facette « gourmande ».
Olivier Cresp, le portrait
On attribue la paternité des parfums gourmands à Olivier Cresp. Rencontrer ce très grand parfumeur dans son bureau, une caverne d’Ali Baba de senteurs qui s’épousent et imprègnent jusqu’aux moindres recoins votre peau, est un plaisir incomparable. Des centaines de fioles sont disposées sur les étagères et sur sa table de travail, des mouillettes, sont éparpillées un peu partout. L’homme est simple, sympathique et il règne en lui un bel esprit de partage. Nous devions passer une heure ensemble, mais trois heures plus tard, nous étions encore tous deux en train de parler et de humer ses nouvelles créations. Je les ai portées sur ma peau et, en aficionados du parfum, nous nous sommes sentis et ressentis l’un l’autre. Comme tous les grands artistes, Olivier Cresp est un cérébral à la sensibilité à fleur de peau. Le voir tester ses formules, c’est se rendre compte de la précision et de la méticulosité qu’exige le métier de nez, avec, en filigrane, un doute lancinant qui pousse à la recherche constante de la perfection, de la note ultime.
La Dynastie Cresp
Olivier Cresp aurait pu se contenter de ses succès, Dune pour Homme (Dior), Kokorico (Jean-Paul Gaultier), Ange ou Démon (Givenchy), Midnight Poison (Christian Dior), Place Vendôme (Boucheron), Black XS (Paco Rabanne), Nina (Nina Ricci), Black Opium (Yves Saint Laurent), Mon Paris (Yves Saint Laurent), mais ce nez a une descendance, Sébastien et Anaïs, tous deux tombés dans le chaudron. L’histoire d’Akro est la suite d’une épopée dynastique qui prend ses racines au début de l’industrie du parfum à Grasse jusqu’à aujourd’hui.
« J’ai grandi à Grasse, dans une famille heureuse de négociants de fleurs, où les odeurs de jasmin, de rose tubéreuse et d’arbres fruitiers ont été les premières à m’inspirer. Je les cueillais le matin. Avec de l’alcool acheté en pharmacie, je faisais mes propres extractions. Je les laissais macérer. Cela sentait bon. Je mettais des petites gouttes dans des pipettes : c’étaient mes premiers essais. J’allais ensuite dans la fabrique de mon père pour tout sentir : les matières premières qu’il faisait ou qu’il acquérait, les molécules de synthèse. Je les connaissais toutes. »
Akro, Londres, Pop Art et Rock and roll
Pour Akro, tout a commencé il y a quelques années, alors qu’Anaïs Cresp vivait à Londres et travaillait dans les pubs et les bars du quartier animé et diversifié de Ladbroke Grove. Son inspiration est partie de là — la maison de Trellick Tower, Portobello Market, Honest Jon’s, une centaine de stations de radio pirates, un millier de narguilés, Joe Strummer, AJ Tracey, les personnages de Martin Amis, et le bourdonnement omniprésent du Westway.
Enchanté par les senteurs qui l’entouraient, par les étals de fleurs, les cafés et les barbecues au charbon de bois, par le whisky et le cuir des grands pubs irlandais et par l’inévitable brume d’herbe dans l’air, une idée lui vient. Embouteiller ces arômes distinctifs et les transformer en fragrances. Père et fille commencent à partager leurs pensées et à imaginer des histoires. Akro naît avec une ligne directrice, pousser le parfum au-delà des normes établies. Pour créer cette première collection, Olivier Cresp a expérimenté plus d’un millier de combinaisons. Au fur et à mesure de son développement, Akro toujours intrigant, parfois clivant, jamais prévisible, continue d’innover et de se renouveler avec Anaïs comme boussole des tendances.
Les vices de l’Homme sont la preuve de son goût pour l’infini. Charles Baudelaire
Les plaisirs coupables sont est au cœur de la gamme, avec sept péchés capitaux. — cigarette, cannabis, sexe, chocolat, caféine, alcool, tatouages comme une expression d’un droit à la jouissance et à l’outrance « Imaginer les sept jus, Smoke, Haze, Night, Dark, Awake, Malt et Ink m’a permis de me dépasser. Je me suis fait plaisir ». Grâce à l’expertise d’Olivier et à l’ingéniosité d’Anaïs, les premiers parfums voient le jour : algues, absinthe, noisettes, cumin et whisky ne sont que quelques-unes des notes non conventionnelles qui façonnent cette collection unique. Olivier a combiné ces notes extravagantes avec de superbes composants issus de la palette Firmenich, où il formule des parfums depuis 1992. Firmenich, fondée en 1895, est actuellement la première entreprise mondiale privée de parfums et d’arômes, et numéro un de la parfumerie et des ingrédients, détenant 4 000 brevets et employant 12 000 personnes.
« Akro est destiné à ceux qui n’aiment pas dire non, à ceux qui vivent leur vie dans l’excès », explique Anaïs. À les sentir, les porter, on est dans le débordement, sans limites, dans les surdosages et les ingrédients les plus hallucinés. Le goût amer d’un expresso matinal, le souffle froid et fumé d’un bourbon sur glace, la première bouffée d’une cigarette post-coïtale, le fumet incomparable du haschich flottant dans l’air de la ville en été, la morsure de l’encre du tatouage, l’odeur des sécrétions magnifiques après une nuit de passion, le sillage fort, envoûtant, provocant, des parfums Akro ne laisse personne indifférent. On se donne le droit d’être sexy sans concession à la douceur, de clamer haut et fort que la débauche peut être plus séduisante que la doxa de la bien-pensance, qu’une chose incongrue vous tient magistralement au ventre, que nous nous ne voulons pas faire l’amour, mais le commettre. Sans le péché, point de sexualité, et sans sexualité, point d’histoire nous rappelle Soren Kierkegaard — Du concept d’angoisse (1844).
Le fruit défendu
Au mois de mai un huitième péché capital, celui de gourmandise s’est ajouté au sexe, aux tatouages, au tabac, à l’alcool, au chocolat, au cannabis, à la caféine avec l’arrivée de Bake, un parfum aux notes de citron acidulé, agrémenté de vanille sucrée et surdosée de praline. Un gourmand dont l’arôme de pâtisseries fraîches et de sucre collant s’inspire des cultissimes cupcakes au citron de chez Crumbs & Dollies, sur Carnaby Street et qui déclenche le désir immédiat de croquer la chair de celui ou celle qui le porte, quitte à être instantanément chassé de l’Eden.
« Nous essayons d’innover autant que de provoquer — en cherchant toujours le juste milieu entre la fantaisie et la réalité, le plaisir et la douleur, la science et le sexe », disent Olivier et Anaïs Cresp d’une seule voix.
Finalement, comme l’écrivait Oscar Wilde, il n’y a pas d’autre péché que la stupidité.
La collection Akro – Par addiction
Awake > Café
Il revisite la folie du café à travers un concentré d’énergie instable qui trouve sa puissance dans des senteurs amères. Notes : Café Santos, cardamome verte, citron italien, vétiver haïtien.
Dark > Chocolat
Il emprunte au chocolat ses facettes les plus séduisantes pour jouer avec les émotions et captiver les sens. Notes : Cacao, chocolat noir, cannelle, noisette, vanille.
Haze > cannabis
Il est comme un souffle, libère en créant une sensation non résolue. Entre deux états, deux notes. Notes : Absinthe, Armoise, Eucalyptus, Menthe verte, Sauge sclarée.
Smoke > Cigarette
Il est inspiré par le plaisir de la première bouffée d’une cigarette, qui est consommée aussi vite qu’elle est allumée Notes : Feuilles de tabac des Balkans, Cade, Benjoin, Fève Tonka.
Malt > Whisky
La synthèse parfaite d’une liqueur délicate et d’une ivresse qui laisse sa trace sur la peau. Notes : Whisky, rhum, cuir, algues, patchouli.
Ink > Tatouage
Tout le monde se souvient de son premier tatouage : la peur, la montée d’adrénaline, les tentatives futiles de le cacher à ses parents. Notes : Vétiver, encre noire, jasmin, bouleau
Night > Sexe
L’instant incandescent du désir et sa saveur musquée. Quand la nuit appartient à ceux qui se veulent. Notes : Rose bulgare, cumin, safran, agaroud
30ml 80 euros – 100ml 160 euros
Retour au bureau après les vacances d’été : Comment faire face au blues post-vacances